CHANT VIII

Vers 100 à 108

AU LEVER DU JOUR, APRÈS AVOIR RETROUVÉ CURRADO ET NINO, MARQUIS DE MALASPINA*, VIRGILE ET DANTE VOIENT APPARAÎTRE DANS LE CIEL DEUX ANGES, GARDIENS DU LIEU, QUI CHASSENT LA COULEUVRE MALÉFIQUE


Tra l'erba e ' fior venìa la mala striscia,
volgendo ad ora ad or la testa, e 'l dosso
leccando come bestia che si liscia.
Io non vidi, e però dicer non posso,
come mosser li astor celestïali;
ma vidi bene e l'uno e l'altro mosso.
Sentendo fender l'aere a le verdi ali,
fuggì 'l serpente, e li angeli dier volta,
suso a le poste rivolando iguali.

Du côté où n'a point de rempart la petite vallée était une couleuvre ; celle peut-être qui offrit à Eve la nourriture amère ; entre l'herbe et les fleurs venait le méchant reptile, ramenant de temps à autre la tête sur le dos, comme une bête qui se lisse. Je ne vis point, et partant ne puis dire comment se murent les autours célestes; mais bien vis-je l'un et l'autre en mouvement. Oyant les vertes ailes fendre l'air, le serpent prit la fuite, et, d'un vol égal, en haut à leur poste, les Anges revinrent.

* Nino et Corrado Malaspina, appartenaient à une célèbre famille, marquis de carrare, puis princes feudataires de l'Empire pendant huit siècles. Dante loue leur gloire, leur tolérance et leur esprit chevaleresque. On les retrouve dans le Purgatoire, car ils tardèrent à faire pénitence de leurs fautes.