CHANT XVIII

Vers 1 à 39

TANDIS QUE LES ÂMES QUI FURENT NÉGLIGENTES À ALLER VERS DIEU DURANT LEUR VIE SE HÂTENT DE GRAVIR LES PENTES DE LA MONTAGNE DU PURGATOIRE, VIRGILE PARLE À DANTE DU PARFAIT AMOUR

Posto avea fine al suo ragionamento
l'alto dottore, e attento guardava
ne la mia vista s'io parea contento;

e io, cui nova sete ancor frugava,
di fuor tacea, e dentro dicea: 'Forse
lo troppo dimandar ch'io fo li grava'.

Ma quel padre verace, che s'accorse
del timido voler che non s'apriva,
parlando, di parlare ardir mi porse.

Ond' io: «Maestro, il mio veder s'avviva
sì nel tuo lume, ch'io discerno chiaro
quanto la tua ragion parta o descriva.

Però ti prego, dolce padre caro,
che mi dimostri amore, a cui reduci
ogne buono operare e 'l suo contraro».

«Drizza», disse, «ver' me l'agute luci
de lo 'ntelletto, e fieti manifesto
l'error de' ciechi che si fanno duci.

L'animo, ch'è creato ad amar presto,
ad ogne cosa è mobile che piace,
tosto che dal piacere in atto è desto.

Vostra apprensiva da esser verace
tragge intenzione, e dentro a voi la spiega,
sì che l'animo ad essa volger face;

e se, rivolto, inver' di lei si piega,
quel piegare è amor, quell' è natura
che per piacer di novo in voi si lega.

Poi, come 'l foco movesi in altura
per la sua forma ch'è nata a salire
là dove più in sua matera dura,

così l'animo preso entra in disire,
ch'è moto spiritale, e mai non posa
fin che la cosa amata il fa gioire.

Or ti puote apparer quant' è nascosa
la veritate a la gente ch'avvera
ciascun amore in 36 sé laudabil cosa;

però che forse appar la sua matera
sempre esser buona, ma non ciascun segno
è buono, ancor che buona sia la cera».




A son discours avait mis fin le grand Docteur, et attentivement il regardait sur mon visage si je paraissais content: et moi, que pressait encore une nouvelle soif, je me taisais au dehors, el au dedans je disais: «Peut-être qu'en trop demandant je le fatigue.» Mais ce Père vrai, qui s'aperçut du timide vouloir qu'en moi je renfermais, en parlant me donna la hardiesse de parler. D'où moi: «Maître, tant s'avise ma vue dans ta lumière que je discerne clairement tout ce que montre et trace ta raison. Je te prie donc, cher doux Père, de m'enseigner quel est cet amour à quoi tu réduis toute lionne opération et son contraire». «Fixe sur moi, dit-il, les regards pénétrants de l'esprit, et te sera manifeste l'erreur des aveugles qui se font guides. L'âme, créée pour aimer, se porte vers tout ce qui plaît, sitôt que le plaisir l'éveille à l'action. De ce qui existe réellement votre puissance perceptive attira l'image, et la déploie au-dedans de vous, de sorte que l'âme se tourne vers elle: et si vers elle étant tournée, elle s'y incline, ceci est la nature, que le plaisir unit à vous par un nouveau lien. Et comme le feu se meut en haut, en vertu de sa forme, qui le porte à monter là où plus il subsiste dans sa propre matière, ainsi, ayant perçu, l'âme entre en désir, qui est un mouvement spirituel, et jamais ne se repose qu'elle n'ait joui de l'objet aimé. Tu peux maintenant voir combien la vérité est cachée à ceux qui affirment que tout amour est louable en soi. Il se peut que bonne en paraisse toujours la matièreĀ ; mais toute empreinte n'est pas bonne, bien que la cire soit bonne.»