CHANT XXI

Vers 79 à 102

DANS LA CINQUIÈME BOLGE, OÙ SE PURIFIENT LES AVARES ET LES PRODIGUES, DANTE ET VIRGILE S'ENTRETIENNENT AVEC STACE* FERVENT ADMIRATEUR DE VIRGILE

Ora chi fosti, piacciati ch'io sappia,
e perché tanti secoli giaciuto
qui se', ne le parole tue mi cappia».

«Nel tempo che 'l buon Tito, con l'aiuto
del sommo rege, vendicò le fóra
ond' uscì 'l sangue per Giuda venduto,

col nome che più dura e più onora
era io di là», rispuose quello spirto,
«famoso assai, ma non con fede ancora.

Tanto fu dolce mio vocale spirto,
che, tolosano, a sé mi trasse Roma,
dove mertai le tempie ornar di mirto.

Stazio la gente ancor di là mi noma;
cantai di Tebe, e poi del grande Achille;
ma caddi in via con la seconda soma.

Al mio ardor fuor seme le faville,
che mi scaldar, de la divina fiamma
onde sono allumati più di mille;

de l'Eneïda dico, la qual mamma
fummi, e fummi nutrice, poetando;
sanz' essa non fermai peso di dramma.

E per esser vivuto di là quando
visse Virgilio, assentirei un sole
più che non deggio al mio uscir di bando».



«Maintenant je vois le filet où ici vous êtes pris, et comme on s'en dégage, pourquoi le tremblement, et de quoi vous vous conjouissez. Qu'il te plaise maintenant que je sache qui tu fus; pourquoi tant de siècles tu as été gisant, je l'ai compris par tes paroles.

- Au temps où le bon Titus, avec l'aide du souverain Roi, vengea les blessures d'où sortit le sang vendu par Judas; revêtu du nom le plus durable et le plus honoré, j'étais là célèbre, mais n'ayant pas encore la foi. Tant fut doux le souffle de ma voix, que de Toulouse à soi m'attira Rome, où je méritai que de myrte mes tempes fussent ornées. Là encore on me nomme Stace; je chantai de Thèbes, puis du grand Achille; mais sous la seconde charge en chemin je tombai. De mon ardeur furent la semence les étincelles de la divine flamme qui m'embrasa, et à laquelle se sont allumé plus de mille; je parle de l'Enéide, qui me fut une mamelle et une nourrice de poésie; sans elle je n'eusse pesé une drachme. Et pour avoir vécu là quand vivait Virgile, je consentirais que, d'un soleil plus que je ne dois, fût retardée la fin de mon bannissement».